Les larmes sont là pour nous rappeler que la philosophie n'est pas une entreprise de totalisation. Elle est aussi là pour accueillir ce qui est perdu, ce qui ne pourra jamais être consolé.

N’y a-t-il pas une tension contradictoire entre pleurer et philosopher ? Le temps des pleurs n’est-il pas autre que celui de la pensée ? Ne convient-il pas que le philosophe tienne passions et émotions à distance pour les comprendre, et se garde des larmes ? Il sait bien que les affects peuvent tromper la raison et qu’en société, les pleurs servent la rhétorique émotionnelle propre à un groupe. Dans ces trois séances nous montrerons pourtant que les larmes, qu’elles soient de tristesse, de deuil, de honte, de colère, de joie, irriguent la pensée. Elles l’affectent, l’humilient et l’élargissent. Elles ne sont pas seulement un relais de la pensée lorsque celle-ci se trouve débordée par les affects, elles ne sont pas le dehors de la raison. Les pleurs la suspendent, l’interrompent, la relancent. Ils la contraignent à l’hésitation, au doute mais aussi à la gratitude voire à l’anticipation d’un bonheur à venir. Nous pleurons notre impossible toute-présence à l’événement, le contretemps dans lequel il nous faut vivre, celui de la mémoire comme de l’anticipation. Mais dans le temps où nous pleurons, cette coïncidence impossible nous est pourtant mystérieusement donnée. Nous la nommons alors consolation, réconciliation, contact, vérité. Les pleurs rappellent la non-coïncidence de nos pensées au réel, elles mettent au jour le raté qui fonde notre existence pour lui redonner sa chance. C’est de ce paradoxe qu’il sera question.

En savoir plus sur le cycle de conférences.

3 podcasts d'une heure :

  • 1er podcast : Et si les philosophes pleuraient ?
  • 2ème podcast : De la pitié au deuil
  • 3ème podcast : De l’attente à l’espérance